Qu’ils soient acquis ou congénitaux, les grains de beauté de l’enfant doivent être surveillés afin d’apprécier leur évolution. Le Docteur Ioannis Dimitriadis, dermatologue et vénérologue, spécialiste en dermatopédiatrie, nous explique comment bien les protéger.
Ce que nous appelons communément un grain de beauté est en réalité un nævus. “Le terme grain de beauté n’est pas signifiant pour un médecin, on se réfère à des nævi”, explique le dermatologue. “Il s’agit d' une tumeur cutanée bénigne, une prolifération mélanocytaire. Les mélanocytes sont responsables de la pigmentation cutanée”, ajoute-t-il.
Les différents types de grain de beauté chez l’enfant
On parle de naevus acquis, lorsque le grain de beauté se développe dans l’enfance, à partir de l’âge de 6 mois. Ce sont les grains de beauté les plus fréquents et ceux que les dermatologues ont le plus l’habitude de contrôler. “De nombreux facteurs influent sur le nombre de ces nævi acquis : l’hérédité, différentes maladies chroniques de l’enfant, une éventuelle immunosuppression (lié à un déficit immunitaire primaire de l’enfant ou à une maladie) mais aussi l’exposition solaire.”, explique le dermatologue. La plupart sont des lésions pigmentées, soit plates, soit en relief et mesurant de 1 mm à 6 mm, on parle alors de nævi typiques. “Mais lorsque ce grain de beauté présente une forme irrégulière, mesure 5 voire 6 mm de grand axe, a des contours dentelés, on parle de nævi acquis atypiques,” précise le médecin.
Il existe également une autre particularité chez l’enfant, beaucoup plus rare chez l’adulte, le nævus de Spitz. “On le voit plus particulièrement au niveau du visage et sur les extrémités, il s’agit d'un grain de beauté en dôme, habituellement non pigmenté (achromique) rose ou rougeâtre. Il arrive que l’on passe à côté alors qu’il demande une surveillance particulière. Il peut être confondu avec un granulome pyogénique ou même des taches de rousseur ou des angiomes rubis”, explique le Dr Dimitriadis.
Lorsque l’enfant naît avec le grain de beauté, ou que celui-ci apparaît dans les deux premiers mois de vie, on parle de nævus congénital. “Les nævi congénitaux sont plutôt rares. Il en existe de trois catégories : petite taille, taille intermédiaire et grande taille, voire géant”, détaille le médecin. Sur les nævi congénitaux de petite taille, c’est à dire de moins d’1,5 cm, il est parfois difficile de faire la différence avec un naevus acquis typique ou atypique.
“Avec les nævi congénitaux de grande taille, voire géants, il faut être vigilant car il existe un risque de dégénérescence maligne, même à l’âge prépubertaire, avant l’âge de 10 ans. Face à toute modification de la surface, l’apparition de nodules, ou un saignement, il faut consulter un médecin”, recommande le Dr Dimitriadis. En revanche, si le naevus congénital est petit, le suivi est essentiellement superposable à celui des nævi acquis.
À quel âge apparaissent les grains de beauté ?
En dehors des nævi congénitaux qui peuvent être présents dès la naissance, les grains de beauté apparaissent à partir de l’âge de 6 mois. “Chez un enfant c’est normal d’avoir des nævi acquis qui peuvent croître jusqu’à l’âge de 20 ans, et parfois même au-delà”, rappelle le dermatologue. Si le nombre varie en fonction des individus, on estime qu’un enfant avant l’âge de 2 ou 3 ans présente environ 3 à 5 nævi acquis, et on peut passer à 15 grains de beauté acquis vers l’âge de 7 ans.
Comment prévenir ces complications ?
“Même si cela reste rarissime chez les enfants, le suivi des nævi acquis et congénitaux est important en raison du risque de dégénérescence maligne et donc d’apparition d’un mélanome”, explique le Dr Dimitriadis. Son apparition reste exceptionnelle mais si c’est le cas cela arriverait à partir de l’âge de 10/12 et chez les adolescents. Le dermatologue précise qu’il est intéressant d’avoir un suivi dans certains cas : s’il y a des cas de mélanome chez les parents, grands-parents, frère ou soeur.
“On est également plus vigilants s’il y a un nombre élevé de grains de beauté atypiques, en particulier s’il mesurent plus de 6 mm de grand axe, ou si l’enfant est immunodéprimé”, ajoute-t-il. Ce dernier précise également dans une immense majorité des cas, environ 85 %, le mélanome résulte de l'apparition de nouvelles lésions et non de la transformation d’un grain de beauté existant.
Pour protéger les grains de beauté, il faut protéger la peau de l’enfant
“Toute exposition au soleil avant l’âge de 2 ans est proscrite”, rappelle d’emblée le Dr Dimitriadis. Après deux ans, l’exposition doit demeurer très parcimonieuse et il ne faut surtout pas faire l’impasse sur la crème solaire. “Il faut appliquer une crème solaire adaptée avec de préférence un filtre minéral, 30 minutes avant de s’exposer puis renouveler l'application toutes les deux heures”, recommande le dermatologue. Ce dernier rappelle qu’il faut également éviter l'exposition entre 11h et 16h. Une préconisation qui vaut également pour les adultes ! Des coups de soleil nombreux jusqu’à l’âge de 16 ans, en particulier chez un enfant avec un phototype clair, jouent un rôle crucial dans l'apparition de mélanome à l’âge adulte.
Si protéger efficacement l’enfant du soleil est indispensable, cela n’est pas suffisant pour s’assurer que tout va bien, en particulier si l’enfant a des nævi congénitaux de grande taille ou des nævi atypiques. “Il faut un suivi auprès d’un dermatologue qui réalisera un examen dermoscopique. Cette loupe qui grossit dix fois permet de voir le patron des grains de beauté et de tirer des conclusions pragmatiques sur leur bénignité”, explique le médecin. “Dans le cas d’un nævus de grande taille, le suivi aura lieu dans un centre de référence. Pour les nævi atypiques, on programme un suivi semestriel ou annuel basé sur la vidéodermoscopie, examen de référence pour réaliser une cartographie”, ajoute-t-il.
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