Points noirs, pustules, papules sont autant de symptômes de l'acné, une maladie de peau fréquente chez les ados, mais pas seulement. Le Docteur Ioannis Dimitriadis, dermatologue, nous éclaire sur les causes de l'acné mais aussi les traitements efficaces pour la guérir.
Maladie dermatologique chronique inflammatoire, l’acné est une maladie fréquente. Si on l’associe volontiers à l’adolescence, elle peut en réalité survenir à n’importe quel âge, chez les hommes comme chez les femmes.
1. Qu’est-ce que l’acné ? Définition
“L’acné est une maladie inflammatoire de la peau et en particulier de ce qu’on appelle l’unité pilo-sébacée. Celle-ci contient deux choses : le follicule pileux (une dépression de l’épiderme d’où émerge le poil) et la glande sébacée qui est annexée au follicule pileux”, explique le Dr Dimitriadis. Lorsque cette unité pilo-sébacée s’enflamme, c’est l’acné. Cette dernière peut avoir différentes causes et s’exprimer par différents signes cliniques.
La sévérité de l’acné est classée en différents stades : l’acné minime ou légère, l’acné moyenne, l’acné sévère et l’acné cicatricielle.
2. Les différents types d'acné
Il y a beaucoup de types d’acné, que le dermatologue va différencier en fonction de leur localisation (faciale, dorsale, haut du thorax etc.) mais aussi des signes cliniques.
L’acné rétentionnelle est caractérisée par des lésions rétentionnelles qu’on appelle des comédons. “Il y a un phénomène d’obstruction du canal excréteur de la glande sébacée. On va avoir différentes lésions comme des points noirs (c'est à dire des comédons ouverts) et des microkystes, soit des comédons fermés qui correspondent à une granulation blanchâtre sur la peau”, explique le dermatologue. Une inflammation peut ensuite se développer sur cette lésion.
L’acné inflammatoire, ou acné papulo-pustuleuse, est un type particulier d’acné qui correspond à une inflammation des comédons et est caractérisée par la présence de papules, de pustules et/ou de nodules et de kystes dans les formes les plus sévères.
Il s’agit d’une acné qui associe l’acné rétentionnelle et l’acné inflammatoire, le plus souvent au niveau du visage et du haut du dos.
“En dehors de l’acné “commune” (autrement appelée acné vulgaire / Acne vulgaris en latin), on a également des acnés induites par des médicaments, ainsi que des formes syndromiques de l’acné qui se développent dans le contexte d’une autre maladie dermatologique, comme la maladie de Verneuil (hidradénite suppurée) ou dans le cadre des maladies du système (maladies rhumatologiques) tels que le syndrome SAPHO,”, ajoute le Dr Dimitriadis.
Ce dernier insiste également sur la nécessité d’être attentif à certains signes qui pourraient indiquer qu’il y a un terrain d’anxiété, un trouble compulsif au sein d’une acné primaire commune (vulgaire). “On parle d’acné excoriée des "jeunes filles" lorsqu’il y des excoriations qui se surajoutent aux lésions élémentaires de l’acné (comédons et aux papules/pustules). La personne perce les boutons, ce qui provoque une érosion caractéristique associée à un érythème. On fait une lettre à un psychiatre car s’il y a un paramètre d’excoriations il faut également agir sur le processus du trouble compulsif sous-jacent”, observe le médecin.
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Le terme d’acné du nourrisson, ou d’acné néonatale, englobe en réalité trois problématiques différentes. La véritable acné, avec présence de comédons, est très rare chez le bébé.
“On peut avoir une hyperplasie sébacée qui est quelque chose de banal chez le nourrisson. La glande sébacée gonfle et apparaissent de petites élévures épidermiques blanchâtres, comme les grains de milium, sur l’arrête du nez par exemple. C’est généralement transitoire et régresse bien tout seul avec des soins d'hygiène classiques”, explique le dermatologue.
Dans certains cas le bébé peut présenter des petits boutons, des papules et des pustules mais sans comédons. “On appelle ça une papulo-pustulose céphalique. C’est dû à la prolifération d’une levure, d’un saprophyte bénin de la peau du nouveau-né”, ajoute le Dr Dimitriadis.
Enfin, il arrive que le bébé présente une véritable acné, avec comédons, papules et/ou pustules, mais cela reste rare. “Il est possible de la traiter comme une acné classique, mais les traitements peuvent provoquer une irritation chez le nourrisson qui a une peau fine. Il faut en revanche se poser la question du statut hormonal du bébé afin d’expliquer cette acné qui peut évoluer ensuite vers une acné infantile”, explique le médecin.
Il y a trois types de lésions de l’acné : le comédon, la papule et la pustule.
La lésion élémentaire de l’acné c’est le comédon : la glande sébacée qui gonfle avec rétention de sébum. Le comédon peut être ouvert, on parle alors de point noir, ou fermé et il s’agit là d’une lésion blanchâtre comme un microkyste.
“Lorsque l'inflammation se développe on peut avoir une papule, c'est-à-dire une lésion en relief, palpable. Elle est rouge sur une peau blanche et brunâtre sur une peau à phototype foncé”, détaille le dermatologue. La lésion peut être sensible à la palpation, ou même douloureuse sans qu’on la touche.
Il y a parfois une collection du pus à l’intérieur de la papule, on parle alors de pustule. Ces pustules peuvent se rompre et provoquer des érosions, et donc des cicatrices. “Si la lésion inflammatoire concerne le derme, la couche profonde de la peau, le dégât esthétique peut être important avec une cicatrice qui va perdurer”, explique le Dr Dimitriadis.
Lorsque l’inflammation est très importante, des nodules peuvent apparaître. “Il s’agit de lésions d’un diamètre considérable, plutôt sous peau, qui sont des petites bosses et même parfois des kystes. Ces lésions peuvent se suppurer en formant de petits abcès. Le dégât esthétique peut être important tant sur le plan de la texture de la peau lésée que sur sa couleur, puisqu'il a un fort risque de dyschromie au décours de l’épisode inflammatoire ”, observe le dermatologue.
Les causes les plus importantes sont l’hérédité, les hormones masculines (androgènes) et la bactérie de l’acné appelée Cutibacterium acnes (anciennement dénommée Propionibacterium acnes) ainsi que la perte de diversité entre les phylotypes (souches) de cette dernière. Dans une proportion moindre, l’alimentation et le stress peuvent agir sur un processus d’hyperséborrhée (une production excessive de sébum) au niveau des sébocytes (les cellules qui constituent la glande sébacée), qui se complique d’une obstruction, associée à une inflammation de cette dernière.
Certaines maladies ressemblent à l’acné. “Mais, si on n’arrive pas à identifier le comédon qui constitue la lésion élémentaire patente indicatrice du phénomène d’obstruction, ou éventuellement le microkyste, c’est que ce n’est pas de l’acné, même si l’aspect clinique ressemble, comme dans le cas de la rosacée”, explique le médecin. Dans sa forme inflammatoire, la rosacée se manifeste par des boutons rouges en relief, plus ou moins douloureux, avec du pus à l’intérieur se localisant principalement sur les zones centrales du visage (au pourtour du nez, le bas du front médian et le menton). Mais, en l’absence de comédon, on peut éliminer le diagnostic de l’acné.
L’autre maladie avec laquelle l’acné peut être confondue est la folliculite. Il s’agit de petites pustules centrées d'un poil ou duvet. On peut l’écarter si l’atteinte est limitée au niveau du dos, des fesses.
Enfin, on parle parfois, surtout en été, “de l’acné de Majorque”. “En réalité, il s’agit d’une photodermatose déclenchée par l’exposition au soleil, une lucite qui provoque des boutons sur le visage. Mais là encore, si c’est seulement inflammatoire, qu’il n’y a pas d’obstruction, ce n’est pas de la vraie acné, dite vulgaire”, explique le dermatologue.
“Il est aujourd’hui possible de soigner presque tous les types d’acné, en minimisant le risque de cicatrices”, rassure le Dr Dimitriadis. “Il est très important que la personne aille consulter, car il ne faut pas oublier que l’acné peut avoir un retentissement psychologique majeur. La prise en charge est adaptée à chaque individu, en fonction de son âge, de son sexe, de ses besoins”, ajoute-t-il.
Les traitements par voie orale
La molécule isotrétinoïne (médicament Roaccutane® qui n’existe plus en tant que tel sur le marché français, mais il y a plusieurs autres marques commerciales) est le traitement standard de l’acné. Il s’agit d’un d’un rétinoïde, donc d’un dérivé de la vitamine A. “C’est le médicament que l’on donne en dernier recours en cas d’échec des traitements plus conventionnels. Mais, c’est vrai que même pour une acné non sévère, ce médicament a toute sa place”, explique le dermatologue.
Il s’agit d’un traitement contraignant, avec de nombreux effets secondaires qui nécessite d’adapter la posologie et le schéma thérapeutique à chaque patient/e en fonction de son poids, de ses comorbidités. “On ne peut pas le donner à n’importe qui parce que c’est un médicament qui peut provoquer des troubles de l’humeur, des symptômes dépressifs. Chez certains patients qui ont un problème psychiatrique diagnostiqué, qui présentent une dépression majeure, le dermatologue ne prescrit le traitement qu’après l’accord du psychiatre”, précise le Dr Dimitriadis. Ce dernier ajoute toutefois que le médicament peut leur être prescrit à des petites doses, sur une période prolongée, avec d’excellents résultats.
Interdit pendant la grossesse du fait de sa tératogénicité avérée, ce traitement est subordonné à une surveillance particulière chez les femmes à l’âge de procréer en général car, s’il ne nuit pas à la fertilité, il est en revanche fortement tératogène. “Si la jeune fille est mineure, le parent doit signer un formulaire d’accord de soins indiquant qu’il a bien compris les risques. Dès que le traitement concerne une femme en âge de procréer, même si elle n’est pas sexuellement active, elle a l’obligation de prendre (en plus du préservatif lors de rapports vaginaux), un traitement contraceptif d’efficacité élevée (pilule, implant, stérilet) et de faire une prise de sang par mois pour montrer qu’elle n’est pas enceinte. Elle doit donc se rendre chaque mois chez le dermatologue pour renouveler la prescription et adapter la posologie en fonction de la tolérance clinique et biologique.”, explique le spécialiste.
Si ces rendez-vous fréquents ont un coût et sont contraignants, le Dr Dimitriadis ajoute qu’ils sont aussi sécurisants pour les patientes et le médecin qui peut mieux les surveiller et détecter l’apparition d’un trouble de l’humeur ou une perturbation du bilan hépatique ou une éventuelle exacerbation de l’acné qui peut apparaître au cours des 4 premiers mois de traitement.
Autre effet secondaire dont on parle beaucoup concernant le Roaccutane®: son côté asséchant. “Comme le médicament cible le sébocyte, c’est normal que la peau et les semi-muqueuses (comme les lèvres) s'assèchent. Il faut donc bien les hydrater”, recommande le dermatologue.
Chez une femme qui fait de l’acné à l’âge adulte on peut proposer la spironolactone. S’il s’agit d’un médicament normalement indiqué pour certains problèmes cardiaques, il s’agit aussi d’un médicament qui cible les récepteurs des androgènes au niveau des sébocytes. Il est donc très efficace contre l’acné chez les femmes qui souffrent de problèmes hormonaux avérés tels que le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) ou d’un syndrome hyperandrogénique périphérique.
En première intention, le médecin prescrit des médicaments antibiotiques à visée anti-inflammatoire comme la doxycycline ou la lymécycline. Ils peuvent être prescrits dès l’âge de 8/10 ans mais pas avant. Comme ils sont photosensibilisants, il faut se méfier de l’exposition solaire et donc éviter de le donner en été.
Le zinc est une solution un peu plus naturelle, sans effet secondaire grave. Il a une vraie action anti-inflammatoire mais elle est tout de même d’une puissance moins significative par rapport aux antibiotiques à type des cyclines. “On peut donner du zinc par voie orale pendant 3 ou 4 mois. Si ça ne fonctionne pas, on passe aux antibiotiques pendant 3 à 6 mois et si les résultats ne sont pas assez bons on passe ensuite au Roaccutane®”, recommande le dermatologue.
Il existe beaucoup de traitements locaux contre l’acné dans différentes formes galéniques (crème, gel, lotion) et de nombreuses molécules (péroxyde benzoyle, acide azélaïque etc.). Ils sont préconisés s’il s’agit d’une acné discrète, légère, de l'ordre d'une dizaine de boutons pas plus.
“On peut prescrire une crème de type adapalène, un dérivé de la vitamine A. C’est comme un “petit Roaccutane®” à appliquer localement”, détaille le médecin. Ce dernier ajoute que l’on peut également utiliser une crème à la trétinoïne ou au rétinol, qui est aussi un dérivé de la vitamine A, principalement pour les formes rétentionnelles.
Dans le cas des formes inflammatoires pures, une lotion à base d’érythromycine, un antibiotique présentant des propriétés anti-inflammatoires peut être indiquée. "L'acné n'est pas une maladie infectieuse mais il y a une bactérie qui contribue à l’inflammation”, précise le dermatologue pour justifier l’intérêt de la prescription des antibiotiques dans l’acné.
S’ils ne peuvent se substituer aux traitements que nous avons évoqués, d’autres traitements peuvent les compléter : l’homéopathie, la photothérapie dynamique (PDT), ou la luminothérapie de type Klereska® à raison de 1 à 2 séances par semaine pendant six semaines. Cette méthode est onéreuse avec des effets anti-inflammatoires pas forcement supérieurs à ceux apportés par des cyclines.
On distingue les cicatrices atrophiques et les cicatrices hypertrophiques, ces dernières formant des lésions en relief sur la peau. Il peut également y avoir des lésions cicatricielles dyschromiques, avec une altération de la carnation de la peau : c’est le cas lorsqu’une tache pigmentée apparaît après la disparition de la papule, en prenant sa place. La tâche est hyperpigmentée dans le cas des sujets à phototype foncé et il faut alors faire des traitements dépigmentants locaux ou du laser dépigmentant.
“Pour que la cicatrice apparaisse, il faut qu’il y ait une acné inflammatoire. On va donc agir sur l’inflammation avec l’un des traitements que nous avons évoqués. Le Roaccutane® par exemple agit sur l’acné active mais peut aussi atténuer les vieilles lésions cicatricielles.”, explique le dermatologue.
D’autres prises en charge sont possibles en fonction du type de la cicatrice et de la texture de la peau. “On peut faire du laser avec des paramètres spécifiques sur les cicatrices hypertrophiques. Le laser de resurfaçage (CO2, ou Erbium et / ou laser de type fractionné) est préconisé pour les cicatrices atrophiques, de même que la dermabrasion et la radiofréquence (RF). Tout ce qui va agir sur le derme, c’est à dire la couche moyenne profonde de la peau qui est le siège de fibrobalstes. Ces cellules sont la cible de nos lasers de resurfaçage ou de nos systèmes de radiofrequence car elles sont responsables de la synthèse du collagène. Nos appareils, alors, vont agir sur la fabrication d'un nouveau collagène (néo-collagénèse)", détaille le Dr Dimitriadis. Quant aux cicatrices érythémateuses (rouges), le ciblage des celles-ci avec de la lumière pulsée ou surtout le laser vasculaire (Nd-YAG ou laser au colorant pulsé) donne de bons résultats.
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